Refaire le monde au coin d'une ruelle...
Une maigre superficie suffit pour étudier le comportement de ses semblables. J'habite au coin d'une ruelle où se trouvent un gros bac noir pour les ordures et un gros bac vert pour les matières recyclables. Je sais depuis longtemps que le Québec compte son lot d'analphabètes, mais jusqu'à ce que je réside ici, j'ignorais qu'il comptait tout autant de daltoniens ! Je joue donc souvent les arbitres entre les deux bacs, soutirant du contenu à l'un pour le redistribuer à l'autre. J'ai cru remarquer qu'en maintenant une distance d'environ un mètre et demi entre les deux, les voisins y voyaient plus clair et tendaient davantage à respecter le mandat de chacun. Ce qui me laisse pantoise depuis un certain temps, c'est d'apercevoir régulièrement, au pied du bac noir, de minuscules sacs blancs d'épicerie remplis de déchets. Je vous assure que le couvercle du bac en question n'est pas en béton ! Aucun risque de s'éreinter en le soulevant pour faire un dépôt. Alors qui craint donc à ce point pour sa manucure ? Si tardif soit-il cette année, le printemps annonce le retour prochain des mascottes de ma ruelle : Germaine, Gertrude et Gervaise, les belles rayées aux effluves nauséabonds ! Pas de doute, elles sauront faire honneur à ce que de "bêtes" résidents des alentours jetteront au sol par peur de se salir les doigts. Et par la fenêtre de ma chambre, porté par une douce brise, un parfum viendra me tirer des bras de Morphée certaines nuits...